La dernière répartition des droits d’auteur fait des mécontents au sein des artistes musiciens et plasticiens. Ils veulent savoir comment le Bureau togolais des droits d’auteur (BUTODRA) a reparti l’argent que leurs œuvres ont généré.
« Nous exigeons une explication détaillée de la procédure ayant conduit à la répartition de 15 millions à près de 700 artistes, soit 11,5% des recettes. De même nous exigeons une explication claire et nette de l’usage fait des 88,5% du restant des recettes », réclame la Fédération des associations des artistes plasticiens du Togo. Ils brandissent la menace d’une « série de manifestations si avant la fin du mois de février, aucune explication convaincante » n’est apportée à leurs questions.
Une fronde de grande envergure se prépare donc contre le BUTODRA. Et c’est le signe des récriminations longtemps refoulées des artistes. Il va falloir que le Bureau rassure les artistes qui ne voient pas les fruits de leurs œuvres.
La structure s’est pendant longtemps décrédibilisée auprès de ceux qu’elle est censée protéger. Elle baigne dans une opacité et c’est pourquoi, pour ces artistes, la dernière répartition paraît pour certains la tricherie de trop. Leur amertume se comprend. La production ou la création d’une œuvre d’art mobilise beaucoup d’énergie et se voir payer en monnaie de singe est forcément quelque chose de frustrant. « Comment peut-on comprendre que le BUTODRA va collecter 141 millions FCFA et distribuer 15 millions FCFA aux artistes ? Où est le reste de l’argent ? », se demande Eric Mc, l’un des frondeurs.
Pour le rappeur, le BUTODRA peine à convaincre quand ses responsables justifient que le reste de l’argent a servin, entre autres, à rénover la structure, à acheter des motos pour ses agents, à faire des photocopies. « Il y a anguille sous roche, il y a des artistes fictifs. C’est la première fois que je reçois 15000 FCFA comme ce qui m’est revenu de mes droits d’auteur. Voilà pourquoi on s’énerve », affirme Eric Mc. Il ajoute qu’avant, les artistes ne savaient pas la somme exacte que leurs œuvres généraient, mais aujourd’hui le pot-aux-roses est découvert. « J’ai le rapport d’activité de 2018. On n’a jamais accès à ces dossiers; mais pour la première fois, c’est sorti du cadre du BUTODRA et on les a publiés. La magouille existait depuis au BUTODRA et dans le Conseil d’administration », explique le rappeur.
Toutefois, les artistes ne parlent pas tous le même langage. Pendant que certains dénoncent la malversation qui a cours au BUTODRA, d’autres prennent sa défense. Pour ceux qui apportent leur soutien à la structure, c’est la non maitrise des textes qui en est à l’origine. « Il s’agirait d’une confusion entre le budget du BUTODRA et les fonds destinés à la répartition », indiquent-ils. Ces deux positions traduisent bien le monde des artistes du Togo. Les plus cotés ne sont pas très regardants sur la gestion du BUTODRA. Ils se contentent du revenu que leurs œuvres leur rapportent sur le plan international. « Des artistes ignorent que les droits d’auteur de leurs productions à l’international sont reversées au BUTODRA. Alors qu’il leur suffit d’exiger cela dans les invitations et de notifier leur déplacement au BUTODRA qui se chargera du reste. Or, ils négligent ces procédures », explique un metteur en scène. « Il n’y a que quelques poignées d’artistes qui connaissent ces procédures et ils s’en sortent pas mal », précise-t-il.
Cependant, l’homme de théâtre ne dédouane pas le BUTODRA. Il reconnaît qu’il y a un manque de transparence au sein de la structure chargée de veiller sur les œuvres des artistes. Pour lui, des artistes mêmes prêtent le flanc à ces malversations. Pour l’autre catégorie d’artistes très souvent locale, il y a une injustice dans la répartition des fonds. Et elle monte souvent au créneau pour dénoncer la mauvaise gestion de leur structure. C’est leur droit le plus légitime de réclamer ce qui leur revient. Mais ils sont souvent seuls et leurs actions n’ont pas une réelle incidence pour faire bouger les lignes au BUTODRA. Alors qu’il faut une synergie d’actions pour tous les hommes de culture afin qu’ils jouissent de leurs œuvres. Cette division fait la part belle à ceux qui se servent de l’argent des artistes sans rendre de compte.
« C’est une révolution que nous entamons », souligne Eric Mc connu pour ses prises de position. Que ce vent jette les bases d’une nouvelle restructuration du BUTODRA. Aux dernières nouvelles, il y a des réunions qui s’organisent. Nous y reviendrons.
Source : L’Alternative